Critique publiée en juillet 2012

TOUT ET RIEN

2003 : Namie Amuro a enfin trouvé la voie qu'elle veut emprunter. Après avoir été couronnée de succès avec des sons dance et endiablés en début de carrière, puis avoir sorti deux albums en crise identitaire, la chanteuse japonaise profite de sa popularité toujours décroissante pour faire ce dont elle a envie sans prendre de risques trop énormes au goût de sa maison de disque. En 2002, bien qu'elle ait sorti deux grandes ballades en singles, ce sont bien des sonorités plus R&B qu'elle a exploitées, en prenant part au projet SUITE CHIC. C'est après trois singles dans cette nouvelle optique que Style cloture l'année, trois ans après l'hasardeux break the rules. Malheureusement, le constat n'est pas complètement rose, puisqu'il faudra se contenter de quelques bombes entre diverses tentatives plus ou moins réussies.



Les quatre singles précédant l'album ont finalement bien annoncé la couleur, dans le sens où ils partaient dans tous les sens. On avait commencé la série avec Wishing On The Same Star, qui veut se la jouer grande ballade pourvue en émotions. Il s'avère qu'elle est plutôt jolie, mais en aucun mémorable tellement elle est passe-partout. Dans le même genre, la ballade précédente, I WILL, lui était supérieure en tout point (voix, instruments, arrangements, construction...). Dommage qu'elle ne soit restée qu'un single figurant sur un obscur best-of... Namie a enchaîné avec Shine more. Si on lui sent une volonté plus R&Bisante avec un rythme saccadé, il m'est d'avis que ce n'est qu'un titre pop dont le rythme fait plus penser à Britney Spears qu'à Janet Jackson. Ne vous méprenez pas, je l'aime bien cette petite piste sans prétention, mais elle n'est peut-être pas ce qu'elle avait voulu paraître. En revanche, c'est la claque garantie avec Put 'Em Up, bien plus sombre, frappante et rythmée. Elle ne laisse pas une seconde de répit et joue de son débit de paroles grave et rapide qui fait immédiatement mouche. Quant à SO CRAZY, et bien je vous avoue que je n'ai jamais compris l'engouement qu'elle provoque chez les fans de la chanteuse (dont je fais logiquement partie après tout). Pour moi, elle a "le cul entre deux chaises", puisqu'elle veut aussi jouer dans la cour R&B flambant neuve de Namie, mais elle conserve une mélodie enthousiaste très pop. Bien que ce ne soit pas du tout un massacre, je ne retiens que son petit break de rap (très efficace en live), puisque je regrette son manque de punch. Et puis, passer derrière Put 'Em Up ne l'aide en aucun cas à redorer son blason. Autant aller écouter Shine more en somme... Bref, il y a des bonnes pioches et des pioches moins convaincantes, à l'image de l'album complet, déchiré entre les envies R&B et le passé pop de l'interprète :

Pour coller avec ses envies R&B du moment, Namie nous offre des morceaux plus langoureux quand ils sont lents, plus sombres quand ils veulent créer une ambiance particulière, et plus saccadés quand ils veulent être dynamiques. C'est indéniable. Mais ce n'est pas toujours un réussite garantie. L'introduction met bien le ton. Elle ressort particulièrement grâce à son instrumentation plutôt rythmée et très inspirée du Moyen Orient avec ses flûtes et ses vents envoûtants. On sent aussi la chanteuse très impliquée dans l'interprétation : elle grogne, elle crie, elle fait traîner sa voix. C'est tout ce qu'elle n'avait jamais osé faire. Rien que pour cela, Namie's Style mérite un salut. Cependant, elle mouline un peu quand il s'agit de ses refrains extrêmement répétitifs et plats. Indy Lady est très noire. Il est évident avec son rythme lourd et marqué qu'elle a emboîté le pas à Put 'Em Up. Dommage qu'elle se plante complètement à cause d'un chant absolument pas mélodieux. Je pense que c'est le genre de titre qu'on aime ou qu'on déteste. Malheureusement pour moi, ce fut l'option 2 dès la première écoute ! On passe par le mid-tempo Don't Lie To Me, à la limite de la ballade. C'est mignon, lent, grave, traînant, répétitif ...et c'est aussi soporifique à souhait. Si ce n'est pas un supplice à écouter, son absence ne se ferait pas remarquer. Fish est l'occasion pour Namie d'inviter son nouveau pote Verbal (avec qui elle avait enregistré le très bon Lovin' It en 2001). Les deux artistes se retrouvent pour une chanson plus enjouée et entraînante. Si Fish souffre d'une mélodie répétitive, elle peut compter sur son instrumentation judicieusement basée sur les instruments traditionnels asiatiques. De plus, le rap de Verbal est absolument excellent et donne un coup de boost à chacune de ses apparitions. Pourtant, sur le long terme, on peut facilement l'oublier. Je pourrais aussi vous parler de Gimme more, mais je pense que cette chanson souffre du syndrome Shine more : elle est bien plus pop que R&B contrairement aux apparences...

La deuxième moitié de l'album est donc dans l'ancienne optique : de la pop simple et relativement efficace. Il y a donc l'inédite Gimme more, qui en dépit d'un refrain et d'un rythme extrêmement hachés et percutants, roule ouvertement sur les platebandes de Britney Spears. J'ai toujours trouvé que c'était le Don't Go Knockin' On My Door, (en légèrement plus dynamique), de Namie en fait... Dans un autre genre, LOVEBITE est un mid-tempo assez charmant et planant avec des sonorités très synthétiques. S'il ne marquera pas du tout la discographie de la chanteuse, il fait plutôt bonne figure sur l'album, surtout qu'on ne peut pas dire que miss Amuro nous ait souvent servi ce genre de morceau. As Good As est un up-tempo pop rock, enfin POP-rock. C'est plutôt sympathique, même si on échappe à des canards de justesse lors des couplets... Le problème ? Elle est tellement convenue que, sur le long terme, on ne se souvient même pas qu'elle a existé. Restent alors deux inédites. D'un côté, la douce, jolie et poignante Four Seasons vient soutenir Wishing On The Same Star dans le rang des ballades. En réalité, elle fait plus que la soutenir : elle la pulvérise grâce à des refrains charismatiques et quelques sonorités traditionnelles asiatiques en fond. Ça, c'est fait ! Enfin, il y a COME, la face B électro-synthétique enjouée, douce et totalement planante du single SO CRAZY. Il m'est d'avis qu'elle est à SO CRAZY ce que Four Seasons est à Wishing On The Same Star : c'est-à-dire la chanson qui met la honte à l'autre tant elle n'était pas censée la surpasser à la base. Quoi qu'il en soit, pour un album voulu plus R&B, on peut constater que l'on trouve de tout, et peut-être même plus de pop que de sonorités R&B.



Conclusion : Style est un pot pourri mélangeant pop et R&B ("R&B" : toujours dans la limite de la J-pop hein...). Au moins, on ne pourra pas reprocher à Namie de tourner en rond. Mais les premiers tests ne sont pas les plus concluants. Premièrement, le renouveau tant annoncé n'est pas tellement flagrant. Et surtout, la plupart des chansons sont aussi sympathiques que fades. Lors de la première écoute, on a l'impression d'avoir affaire à un opus varié et solide. Or, sur le long terme, on n'a plus vraiment envie de l'écouter, tant les pistes perdent en intérêt. Prenez Wishing On The Same Star, et vous ressentirez l'impression provoquée par l'album complet : une ballade jolie, bien chantée, plutôt bien produite, mais aussi terriblement générique. Bien sûr, Style était nécessaire à Namie pour se poser, surtout que pour la première fois de sa carrière, son producteur fétiche, TK, n'est plus de la partie. Aussi, il faut le prendre pour ce qu'il est : un album de mise au point, qui prépare le terrain pour la suite. Aujourd'hui, je n'en retiens réellement que trois chansons aussi différentes les unes que les autres : l'up-tempo Put 'Em Up, la ballade Four Seasons et le mid-tempo COME.

Note : 5/10

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