Critique publiée en mai 2008, modifiée en avril 2009, et complètement retravaillée en juin 2012
PARCE QU'ELLES LE VALENT BIEN

C'est finalement très simple. Chemistry a repris les points forts de leurs deux premiers albums et a amplifié leur effet grâce au soin apporté à la production. Comme sur leurs deux premiers albums, on trouve de petites pépites que seules les Girls Aloud auraient pu chanter. L'ambiance générale qui s'en dégage est similaire à celle qui n'émanait alors que de leurs plus grosses bombes comme Sound Of The Underground, No Good Advice ou encore Graffiti My Soul. En effet, on ressent toujours leur griffe mélangeant sonorités rétrospectives et mélodies déjantées, le tout mis à profit sur des titres modernes et hybrides, très souvent destructurés. Si vous n'êtes pas immédiatement sous le charme, au bout de quelques écoutes, le résultat est ravageur ! Mais ce n'est pas la seule bonne nouvelle, puisque cette ambiance unique aux Girls Aloud se ressent de la première à la dernière minute. Même si certaines chansons sont plus faibles que d'autres, Chemistry est bel et bien un album 100% Girls Aloud. Adieu les fades pistes de remplissage que l'on trouvait en 2003 ! De plus, contrairement à What Will The Neighbours Say? qui partait dans tous les sens (même s'il le faisait bien), Chemistry est cohérent et régulier. Les chansons s'enchaînent de manière extrêmement fluide, et jamais on n'a envie de zapper une piste. Il y a d'ailleurs un travail à saluer au niveau de l'agencement des pistes. Comme je l'ai dit, toutes les chansons ne sont évidemment pas du même niveau. Et pourtant, grâce à leur place sur la galette, elles sont toutes suffisamment mises en valeur, les tubes tout trouvés épaulant les pistes plus faibles, ou encore les moments électro-synthtiques s'insérant judicieusement entre deux morceaux beaucoup plus rétrospectifs. L'équilibre est tout simplement parfait ! Je me demande si les filles se sont rendues compte de la qualité de l'opus, tant il est ici flagrant qu'elles et leur équipe d'auteurs se comprennent mutuellement.
Je n'ai pas envie de procéder à des descriptions pistes par pistes. Il s'agit d'un ensemble que je ne songerais pas une seconde à "diviser". De plus, faire du piste par piste ne lui ferait pas honneur tant quelque chose se dégage de l'enchaînement des morceaux. Comme on le dit, "l'union fait la force". Mais bien sûr, il faut bien que j'explique un peu ce qu'on peut concrètement écouter dans cet excellent Chemistry. Il y a tout d'abord quelques ballades. Je commence volontairement par les chansons les plus faibles qui sont judicieusement éparpillées ci et là. De toute façon, les filles n'ont jamais été très convaincantes avec les pistes lentes. A vrai dire, leur plus grande réussite dans ce genre là reste à mes yeux toujours Some Kind Of Miracle, la ballade très "popstars" qui figurait sur leur premier album... Ici, on a droit à une grande ballade, une ballade rétrospective, et une ballade mélancolique et presque inimiste : la jolie reprise See The Day, qui manque malheureusement d'impact, peut-être à cause de l'instrumentation trop minimaliste, ou peut-être à sa perte en puissance au fil des écoutes ; la tristounette Whole Lotta History, qui a du caractère, qui propose des variations mélodiques intéressantes entre les couplets, et qui dispose de magnifiques couplets ...malheureusement suivis de refrains assez ennuyants en plus d'être un injuste solo de l'omniprésente Nadine ; enfin, il y a No Regrets, un solo de ...Nadine (pour changer...) qui est totalement transparente.
Heureusement pour nous, on est en terrain connu avec les titres rétrospectifs, entraînants et entêtants qui sont assez nombreux, sans pour autant être des singles ! Ce qui veut dire que l'on est servi en excellentes inédites. Et mine de rien, il n'y a rien de tel pour faire plaisir aux fans ! On ouvre cette catégorie avec l'excellentissime Biology, qui pousse la recette Girls Aloud à son apogée. On alterne donc des passages très cabarets, et des passages synthétiques, doux et planants nous menant à des refrains qui sont eux très dynamiques. On sent la tension grimper peu à peu tant la construction ne se contente pas de suivre "bêtement" les classiques couplet - pont - refrain. On enchaîne avec la très fun Wild Horses, qui s'ouvre sur des choeurs rappelant les vieilles chansons chantées en choeur à l'école, avant de s'emballer sur un motif régulier à la guitare sèche. Le message est clair : la chanson est totalement déjantée, à l'image de ces couplets parlés. Qui aurait pu s'attendre à ça sur une chanson rétro à la guitare sèche ? Watch Me Go souffre d'une mélodie extrêmement répétitive (d'ailleurs, les paroles sont très souvent les mêmes...), mais elle reste pourtant un modèle d'efficacité tant elle est entêtante et conserve cette touche déjantée très appréciable. La très sympathique et enjouée Waiting pousse quant à elle la recette Wild Horses plus loin, avec son instrumentation rétrospective jusqu'au bout des ongles. Qu'on ose dire après cela que les Girls Aloud sont interchangeables avec tous les autres girls bands ! Dans le même genre, on retrouve la dynamique et joyeuse Long Hot Summer qui n'était peut-être pas le single le plus indiqué mais qui reste un très bon moment pop, de par son enthousiasme et sa fraîcheur. Racey Lacey est d'ailleurs une pâle copie du phénomène. Mais elle arrive en fin d'album, alors difficile pour elle d'être préjudiciable à l'ensemble. En tout cas, ce genre de chansons va comme un gant au groupe, qui a visiblement choisi de poursuivre sur la route ouverte par l'excellent Graffiti My Soul de What Will The Neighbours Say?.
La petite surprise de l'album est due à la présence de trois titres plus synthétisés et électro que d'habitude. Cette nouveauté est imposée d'emblée avec l'intro aussi courte qu'efficace, suivie de l'excellente Models qui s'est fait plaisir avec le synthétiseur. Elle est sautillante et aussi déjantée que d'habitude. De ce fait, elle colle quasiment immédiatement au cerveau, comme un chewing gum à une chaussure. C'est d'ailleurs là une des marques du génie de la recette des Girls Aloud. Même si on n'apprécie pas forcément un titre à sa première écoute, sur le long terme, il devient comme une drogue et paraît de plus en plus tubesque. Dans un genre tout aussi dynamique, mais bien plus sombre et électronique, les filles se lancent dans la très inattendue Swinging London Town. Cette piste va à cent l'heure et joue la carte du mystère. Bien que je l'imagine difficilement comme un single, elle reste un point fort de l'album, ne semblant pas du tout hors sujet, alors qu'elle fait suite à Long Hot Summer ! Enfin, il y a It's Magic, qui a déjà le très grand mérite d'être un solo de Nicola. Dommage que ce soit sur un titre aussi aigu, puisqu'à paraître presque enfantine, elle ne dévoile en aucun cas la puissance dont elle capable de faire preuve. C'est clairement une des pistes les plus faibles de l'album, mais elle s'écoute assez facilement, à l'image de Nobody But You, la face B de Biology, puiqu'elle surfe sur cette même vague synthétisée et planante. Finalement, le seul défaut de l'album, c'est que les trois derniers morceaux forment un combo assez faible (It's Magic, No Regrets, Racey Lacey). Il permet de prolonger l'alternance des trois styles dominant l'opus, mais il suit 10 superbes morceaux, qui eux font un sans faute. En fait, si vous ne devriez zapper aucune piste en cours de lecture du CD, il est en revanche possible que vous l'arrêtiez après la dixième chanson... Mais j'ai envie de dire que ce n'est qu'un détail à côté de la chaîne solide qui dure de l'introduction à Swinging London Town !
Conclusion : Je ne peux que vous recommander chaudement cet album. C'est un véritable petit bijou pop. On alterne entre quelques ballades, des morceaux rétrospectifs et entraînants, et des pistes plus synthétiques mais non moins déjantées. Les Girls Aloud ont atteint le sommet de leur art, et il me paraît inconcevable d'entendre cet album chanté par quelqu'un d'autre. Le fait est là : elles prouvent ici qu'elles ont leur griffe musicale. Elles font leur propre pop, hybride et efficace, à l'image de l'excellente Biology, qui représente parfaitement tout ce que l'on trouve dans Chemistry. Si c'est leur album qui a le moins bien fonctionné, c'est celui qui leur donne leurs lettres de noblesse et font d'elles un monument incontournable de la pop post 2000.
Note Globale: 9/10
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